Le silence
J'ouvre le robinet pour remplir une
casserole. Le bruit de l'eau qui s'écoule m'ouvre soudain les portes de
l'univers sonore. Le silence drape la pièce comme un voile ténu. Il n'a
rien de profond. Il vit sans moi. Il était là avant que d'être froissé
par le cliquetis de mes clés. Il demeure alors que mes pieds nus
promènent mon être à travers les pièces immobiles.
Ce silence
est léger, insouciant, souriant presque. Je me dis qu'à cet instant il
serait facile de mourir. Le silence se poserait alors comme une
infiniment douce caresse sur mon corps presque endormi. Comme il doit
caresser la nuit le corps souple du chat orangé qui dort sur le bord de
la nationnale, quelques poils clairs et infiniment légers riant au vent.
Oui, pour tromper l'angoissante immobilité, il faut mourir la fenêtre ouverte. C'est mieux.